Parmi les grands moments de la vie du Touareg nigérien Omara "Bombino" Moctar, il y a sans doute ce concert de janvier 2010 au pied de la mosquée d'Agadez (la vidéo est sur internet). La musique s'embrase en joie violente, nécessaire catharsis dans une vie d'adversité. Bombino, 30 ans, rentre alors de trois ans d'exil au Burkina Faso. En 2007, il avait dû fuir le Niger après l'exécution de deux de ses musiciens par les militaires.
Un an après Agamgam, chef-d'oeuvre acoustique, Agadez est le premier album international de Bombino. Un disque enregistré en partie aux Etats-Unis, avec des musiciens américains. Pour autant, la musique de Bombino n'est pas déracinée ni dénaturée. Nomade dans l'âme, elle est toujours aussi unique et magique. Le rock touareg, ou blues du désert, est par nature économe. Bombino en joue une version épurée, étirée, zébrant ses chansons hypnotiques de riffs de guitare électrique subtils et puissants.
Bombino et son groupe sonnent comme un Velvet ocre, au coucher du soleil. Sa voix douce, presque féminine, louvoie comme un ruisseau au milieu de chansons qui ont soif. Il y a une science ancienne, immuable et réparatrice, dans le chant de Bombino. Il y a Skip James, Tim Buckley, Bob Marley et Ali Farka Touré, l'essence de la chanson folk poussée dans les hauts confins du mysticisme.
-Les Inrockuptibles-